Trente six ans. Un bel âge pour Landy Vola Fotsy, compagnie théâtrale des plus singulières à Madagascar. Familiale et indépendante, elle marie tradition et modernité pour toucher un vaste public francophone de son authenticité rurale malgache.
«1000 francs de récompense» de Victor Hugo, par Vincent Colin, avec la compagnie Landy Vola Fotsy © compagnievincentcolin
Une urgence de dire, de faire éprouver les injustices subies par le peuple malgache se dégage de La Paix, la dernière création de la compagnie Landy Vola Fotsy.
Un besoin qui tend les corps et affute les voix des onze comédiens malgaches réunis sur scène pour l'adaptation de la pièce d'Aristophane réalisée et mise en scène par Vincent Colin, dont la compagnie est associée depuis dix ans à celle de Doly Odeamson, directeur artistique de la troupe malgache.
Dans un joyeux mélange de danses, de chants en français et en malgache et d'un burlesque au goût d'ici et d'ailleurs, les artistes donnent chair à une fable comique, à une métaphore de la situation politique et sociale de Madagascar.
Une exception qui monte
Armés de bâtons, de petits tabourets et surtout de leur humour, les comédiens donnent en effet chair à une équipée de paysans farfelus fatigués par la guerre, qui s'en va sur le Mont Olympe chercher la Paix.
Fruit d'un mélange entre une culture occidentale et des références malgaches, le spectacle témoigne d'une démarche inédite sur la Grande Île.
«Il est très difficile de rencontrer des hommes de théâtre à Madagascar, où pullulent par contre les artistes de variétés. D'autant plus difficile que nous sommes isolés par rapport au continent africain qui, et le festival des Francophonies en Limousin en est la preuve, est riche en créateurs», remarque Doly.
Dans ce contexte, même le théâtre à l'italienne le plus simple fait alors figure d'étrangeté.
La population malgache, pourtant, est loin d'y être hermétique. Pour preuve, la compagnie Landy Vola Fotsy qui s'adresse avant tout aux 85% de ruraux qui peuplent l'île n'a aucun mal à trouver son public.
Doly Odeamson n'a qu'à exercer sa verve bien aiguisée pour attirer les habitants du village de Ambohitahara sur les Hautes Terres à une quinzaine de kilomètres au nord de la capitale malgache Antananarivo où est basée sa compagnie. Ce grâce aux spectacles qu'il présente souvent à ses voisins, à l'école de théâtre qu'il a fondée ainsi qu'à son respect des traditions malgaches.
© Compagnievincentcolin
Dans La Paix comme dans ses autres créations, Doly mêle en effet subtilement un savoir-faire acquis en Occident notamment auprès de Jean Vilar au «hira gasy» (littéralement «les chants malgaches» ). Spectacle populaire joué et dansé par des paysans depuis la fin du XVIIIe siècle, cette forme est toujours très vivante dans les campagnes malgaches, bien que méprisée par les structures culturelles qui les considèrent comme «un folklore dénué de toute valeur artistique».
«Je tiens à conserver les codes fondamentaux du hira gasy, surtout l'adresse au public qui me permet de toucher la population rurale que j'aime. Et dans la continuité de cette tradition orale, j'ajoute de nouveaux éléments qui me permettent de davantage me situer dans le présent», précise Doly.
Une approche qui a valu à son auteur des tournées dans tout Madagascar et à la Réunion, et une réputation qui petit à petit gagne le reste de l'Océan Indien.
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